mardi 24 septembre 2024

Tech et Retail : L'humain face à l'IA - Interview de Didier Mamma

Retail Innovation
Tech et Retail : L'humain face à l'IA - Interview de Didier Mamma
La technologie doit libérer le potentiel humain, pas l'aliéner.
Didier Mamma CDO du groupe Decathlon
Dans un monde en constante évolution où la technologie prend une place de plus en plus prépondérante, Didier Mamma, expert en Tech et passionné par les sciences physiques, nous livre son point de vue sur l'impact de l'IA dans le secteur du retail. 

Au cours de cette interview, il partage ses convictions sur l'utilisation responsable de la technologie, les limites de l'IA, et l'importance de conserver l'humain au centre de cette révolution. 

Quelles sont vos affinités avec la Tech ?


Mon affinité avec la technologie découle de ma passion pour les sciences physiques. En effet, j'ai toujours été fasciné par la dynamique des systèmes et les interactions qui régissent le monde physique. Cette passion me pousse à chercher à comprendre en profondeur ces mécanismes pour ensuite pouvoir agir sur eux grâce aux outils technologiques. C'est cette combinaison entre théorie scientifique et application technologique qui me fascine.

Souhaitez-vous nous partager une de vos convictions sur l’usage de la Tech au service des métiers du retail ?


La technologie, par nature, est neutre. Elle peut être un outil puissant au service de l'humain, mais elle peut également devenir une fin en soi, déconnectée des besoins réels. Dans le secteur du retail, où de nombreuses tâches sont manuelles, répétitives, et parfois physiquement exigeantes voire aliénantes, il est crucial d’adopter une approche réfléchie et écologique de la technologie.

Plutôt que de laisser la technologie prendre le pas sur l'humain, nous avons l'opportunité unique de l'utiliser pour libérer le potentiel humain. En automatisant les tâches à faible valeur ajoutée, nous pouvons recentrer l'effort humain sur ce qui compte vraiment : l'interaction humaine, la créativité, et l'amélioration de l'expérience
client. Cette réorientation vers des tâches à forte valeur ajoutée non seulement renforce l’attractivité des métiers du retail, mais permet aussi de réhumaniser un secteur en pleine mutation, offrant ainsi un cadre de travail plus enrichissant et épanouissant.
Les limites de la technologie ne sont pas intrinsèques, mais dépendent des choix que nous, en tant qu'humains, déciderons de poser.

Quelles sont les limites à l’utilisation de la Tech selon vous ?


Les limites de la technologie ne sont pas intrinsèques, mais dépendent des choix que nous, en tant qu'humains, déciderons de poser. Ces choix doivent être guidés par des critères où le bien-être des humains et de la planète doit primer, avec les considérations économiques en second plan. 

En effet, si nous voulons que la technologie serve un avenir durable et équitable, nous devons l'utiliser de manière responsable, en gardant toujours en tête les impacts à long terme sur la société et l'environnement. Cela nous ramène à une question fondamentale : quel monde voulons-nous laisser aux générations futures ? 

La technologie offre un potentiel immense, mais c'est à nous de déterminer comment ce potentiel sera réalisé. En érigeant des limites basées sur l'éthique, le respect de l'environnement, et la préservation des droits humains, nous pouvons construire un futur où la technologie est un vecteur de progrès et non un agent de destruction. 

Le choix nous appartient, et il est impératif de le faire en pensant à l'avenir que nous souhaitons léguer.

Quelle nouvelle division du travail Humain / AI ?


Une nouvelle division du travail entre l'homme et la machine ne peut pas être fondée uniquement sur des considérations économiques. Tout d'abord, le travail humain est soumis à des taxes, tandis que celui des machines ne l'est pas, créant ainsi un désavantage pour les humains dans la sphère économique. 

Ensuite, il est crucial de rappeler que les machines, bien que performantes dans certains domaines, consomment une grande quantité d'énergie et contribuent à la pollution, alors que l'être humain, de par sa nature, est bien plus efficient sur ces aspects. De plus, l'humain possède des qualités que les machines ne peuvent égaler : il est versatile, adaptable, et doté d'une intelligence générale capable de s'ajuster à une variété de contextes. 

L'humain excelle également dans l'empathie, une compétence absolument essentielle dans les processus créatifs, les interactions humaines, et les services. Les machines, malgré leurs avancées, ne peuvent pas reproduire cette profondeur émotionnelle et intuitive qui est au coeur de la relation humaine. 

En fin de compte, cette réflexion nous ramène à une question fondamentale : quel type de société souhaitons-nous construire ? 

Comme le souligne le biologiste Olivier Hamant, voulons-nous une société robuste, capable de faire face aux incertitudes et aux complexités du monde VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity, Ambiguity), ou une société performante mais fragile et discriminante ? 

La réponse à cette question déterminera comment nous choisissons d'intégrer la technologie dans nos vies et dans le monde du travail, et il est essentiel que cette intégration soit guidée par des valeurs humaines plutôt que par des logiques économiques seules.